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par alana chantelune
Adhérent
Aujourd'hui, j'ai vu en avant-première mondiale trois films qui ne sortiront pas tout de suite :Amazonia : énième 'documentaire' sur la nature. Le souci, c'est cette histoire avec un petit singe domestique dont l'avion s'écrase dans la jungle amazonienne. On le suit à découvrir le monde sauvage. C’est assez gnangnan en dépit des images magnifiques. la musique est belle, la 3D est inutile. Seul point positif : pas de voix off.Joe : un film avec Nicolas Cage dont la prestation a été saluée à Venise (sortie en janvier). Une chronique autour de pauvres types du fin fond de l'Amérique : ceux qui sont à la limite de l'indigence, qui triment pour un maigre salaire à la semaine, dans ces petites villes où la misère, la rage, le manque d'éducation et les pulsion primaires tirent tout le monde vers le bas. On suit l'amitié de Joe, un homme proche de la 50aine qui dirige une petite équipe de travailleurs (ils empoissonnent des arbres qui seront abattus par une société d'exploitation forestière) en proie à ses démons (la solitude, les bouffées de colères, la violence) et d'un ados de 15 ans qui tente de gagner un peu d'argent que son poivrot de père lui soutire en le tabassant. La description de cette Amérique profonde fait froid dans le dos.Les acteurs sont épatants. Reste que cela manque un peu d'originalité.Enfin, et surtout, le film qu'il ne FAUDRA PAS rater, parce que vraiment, c'est une claque :Snowpiercer (Le Transperceneige) (sortie le 30 octobre) de Bong Joon-Ho, le réalisateur de The Host.Adapté d'une BD française (3 volumes, une intégrale ressort en octobre), il relate comment ce qui reste de l'humanité s'est réfugié dans un train lors d'une nouvelle ère glaciaire. Dans les wagons arrières, la population est traitée comme des sous-hommes. La révolte gronde, menée par Curtis (Chris Evans, dans un tout autre registre que Captain America, étonnamment bon, surtout dans les scènes finales), qui va se lancer, avec quelques compagnons, dans une équipée pour remonter et découvrir tous les wagons et renverser Wilford, le légendaire créateur du train, qui règne sur tout le monde comme un despote et un gourou.Le thème post-apocalyptique d'une société de survivants faisant office de métaphore de l'humanité est des plus utilisés, j'étais donc un peu sceptique avant la séance. Il m'a fallut un bon quart d'heure pour rentrer dans le film... et ne plus en sortir! J'étais scotchée, terrifiée par l’abominable dictature des êtres et des esprits mis en place au nom de la survie, le cœur battant la chamade pour chacun des héros dont les liens forts ne peuvent qu'émouvoir. On ne voit pas le temps passer, tout simplement. La mise en scène est brillante. Le réalisateur est un maître de la narration, et sait accrocher son spectateur de bout en bout, en dépit des contrainte d'espace que pose l'unité de lieu du train. Attention, cependant, le film est très noir, pessimiste, et on a droit à des scènes de combats et à des giclées de sang, de véritables massacres : il sera probablement interdit ou déconseillé aux moins de 12 ans. Il y a un certain côté éprouvant au visionnage, mais c'est tellement bien fait que l'on "reste" dans le film un petit moment après la projection. Et le réalisateur se permet des moments totalement ubuesque, d'une ironie grinçante, comme cette scène d’affrontement surréaliste où les deux groupes interrompent leur massacre respectif pendant quelques secondes... avant de s'y remettre.Tilda Swinton est absolument renversante, méconnaissable en inflexible porte-parole de Wilford ; elle représente ce trait très particulier de Bong Joon-Ho, qui sait marier le grotesque avec l'horreur ou l'émotion d'une façon que je n'ai jamais vu ailleurs. Kang-ho Song, la star coréenne déjà à l'affiche des précédents films du réalisateur, impose une présence énigmatique, faisant un étrange et malicieux duo avec celle qui incarnait déjà sa fille dans The Host. Les autres seconds rôles sont tous impeccables : Otavia Spencer en mère prête à tout pour retrouver son enfant, Ewen Bremner en père devenu à moitié fou, Alison Pill en glaçante assistante de Wilford, Jamie "Billy Elliott" Belle en jeune idéaliste accroché aux basques de Curtis, Jon Hurt en Gilliam, vieux sage maître à penser des héros... Je retiendrais personnellement le petit rôle muet de Luke Pasqualino (Freddie dans la série Skins), jeune combattant totalement dévoué à Gilliam (relation paternelle ? amoureuse ? Maître et disciple ? On n'en sait rien) et chargé de protéger Curtis : le corps couvert de cicatrices et de tatouages, totalement muet, il vole toutes ses scènes de combat par son regard quasi-fanatisé.Bref, LE film à ne pas rater, même si, pour moi, The Host lui reste supérieur.