Arwen fait le choix de Melian, de Lúthien, d'Idril, de se lier avec un homme à la vie plus courte. Beren devait récupérer un silmaril, c'était là aussi une possibilité improbable.Ëarmirë a écrit :Je dirais que les elfes ne symbolisent pas un peuple supérieur, mi-hommes et mi-dieux, mais plutôt des valeurs, en particulier la sagesse. C'est là que le choix d'Arwen la fait s'éloigner de son peuple, car elle est la première à choisir le coeur et non la raison, l'amour et non la sagesse... Les elfes parviennent parfois à combiner les deux, mais dans son cas la possibilité est tellement faible, à une condition tellement irréalisable, que le choix d'une vie mortelle s'assimile plus à la folie...
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La sagesse ? Les Elfes du SdA peut-être, mais ils ont eu au minimum 6000 ans pour l'apprendre. Les Elfes du Premier Âge et la sagesse, ça fait plus que deux. Fëanor peut être un génie, un passionné, un exalté, un meneur, un visionnaire, bref plein de choses, mais sûrement pas un sage. Et on pourrait trouver d'autres exemples : Caranthir, Curufin, Celegorm, même Fingolfin ou Thingol...Quant à Arwen, elle n'est pas la première : la première est Lúthien, qui est probablement le personnage le plus important de l'œuvre de Tolkien, toutes races confondues. Au demeurant, plutôt qu'un choix entre cœur et raison, il faudrait parler d'un choix entre amdir et estel (qu'on pourrait approximativement traduire par espoir et espérance), car oui, l'œuvre de Tolkien a une gigantesque infrastructure philosophique.Ëarmirë a écrit :Je dirais que les elfes ne symbolisent pas un peuple supérieur, mi-hommes et mi-dieux, mais plutôt des valeurs, en particulier la sagesse. C'est là que le choix d'Arwen la fait s'éloigner de son peuple, car elle est la première à choisir le coeur et non la raison, l'amour et non la sagesse... Les elfes parviennent parfois à combiner les deux, mais dans son cas la possibilité est tellement faible, à une condition tellement irréalisable, que le choix d'une vie mortelle s'assimile plus à la folie...je dirais aussi que les elfes symbolisent les pères et les ancêtres à la fois, ceux sur qui on se repose mais aussi l'objectif à atteindre, la possible évolution des hommes. Ils seraient comme les maîtres ayant pour élèves les hommes.
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En effet, la vision des elfes est très différente dans le Silmarillion et dans le SDA.Dans le SDA, ils donnent l'impression d'un peuple reclu, sur le déclin mais ayant une aura d'aînés: leurs sociétés semblent harmonieuses et apaisées, ils semblent pour la plupart sages, réfléchis, érudits, artistes, bref que des qualités d'un point de vue humain.Mais dès qu'on passe à Bilbo, ils sont moins éthérés, distants. Ce sont de joyeux fêtards qui n'hésitent pas à se pinter la tronche pendant leur garde. Dans le SDA, Legolas est un personnage extraverti et enthousiaste, pas un espèce de robot coincé qui se la pète comme le prétendent les clichés sur les elfes (largement renforcés par les films).Dans le Silmarillion, les elfes apparaissent sous un jour beaucoup plus humain, affectés comme ils le sont par l'orgueil, la colère.Par contre, je ne suis pas du tout d'accord pour dire que les elfes sont d'avantage mis en avant par Tolkien par rapport aux humains, bien au contraire. Ils sont toujours en toile de fond. Même lors du premier âge, où les elfes sont l'espèce dominante, on a surtout des récits mettant en scène des humains ou des semi elfes: les enfants de Hurin, Beren, Earendil sont les réels protagonistes, alors que finalement, on sait peut de choses sur la vie de Fingon, de Gil Galad, des fils de Feanor, ou même de Fingolfin ou de Thingol.... C'est toujours l'humain qui intéresse Tolkien dans ses récits paradoxalement. Il ne faut pas oublier que c'est un catholique. Sa vision de la mort est celle de quelqu'un ayant la foi. Mourir, pour un catholique, c'est le salut. C'est pour cela qu'il parle de don d'Illuvatar: les hommes rejoignent l'éternité après leur mort alors que les elfes demeurent liés à Arda et disparaîtront avec elle. Les numénoréens ont été corrompus parce qu'ils étaient jaloux de la longévité des elfes et qu'ils avaient peur de la mort.Sur l'attractivité des elfes dans les récits de fantasy, et en particulier chez Tolkien, elle s'explique assez bien. Moi même j'aime beaucoup les elfes dans tous les univers de fantasy. Ce sont des créatures qui subliment en effet certaines qualités qu'ont parfois les êtres humains: goût pour l'art et la beauté, sagesse, intelligence.... Ce qui me plait chez eux est qu'il s'agit la plupart du temps de créatures liés à la nature ou tout du moins existant en harmonie avec elle. C'est peut être cela qui explique que les elfes attirent aujourd'hui: ils représentent une harmonie, un équilibre, que ce soit dans leur société (encore une fois, les elfes du Silm sont assez différents), leur culture ou leur mode de vie :cf les Galadhrims ou les elfes des bois, ou même les Noldor, Tolkien raconte à propos de l'Eregion que la présence des elfes fait du bien à la terre, et que celle-ci met du temps avant de les oublier. A notre époque où l'humanité a tendance à détruire sa propre planète (pourtant un véritable paradis en comparaison des autres planètes du système solaire), ce genre de concept touche forcément une corde sensible. Ca n'a rien à voir avec une sorte d'écologisme hippie: c'est une sorte d'idéal perdu, un peu comme les hobbit, vision idéalisée et nostalgique de la société rurale traditionnelle que le monde industriel a presque totalement détruite.En outre, il me semble que Tolkien avait évoqué le fait que les elfes étaient l'incarnation de l'artiste qui sommeille en tout être humain: les elfes sont avant tout des poètes, des chanteurs, des artisans, toujours enthousiastes et sensibles, même dans leurs travers.Il ne faut pas oublier que les elfes sont à l'origine des créatures mythologiques d'essence divine. Les scandinaves du haut Moyen Age leur faisaient des offrandes et des sacrifices comme aux autres divinités (l'Alfablott, chez les scandinaves de la période viking, qui signifie "sacrifice aux elfes" est l'une des grandes fêtes de l'année, qui prend place à la fin de l'automne, au moment où les granges sont pleines et les animaux les plus gras): il s'agit de sortes de divinités liées au soleil et à la fertilité. En les ramenant à un peuple finalement assez proche des humains, en comparaison, Tolkien les a fait pas mal descendre de leur piédestal. Pour un Chrétien, le divin est unique et ne saurait s'incarner dans tout un tas de divinités mineures et autres esprits. Les Valar et Maiar ne sont que des émanations de la divinité suprême Illuvatar. Les peuples de la Terre du Milieu, même les immortels comme les elfes, ne sont pas d'essence divine (bien que les Noldor ait en eux un fragment de la lumière de Valinor). En espérant que mon pavé ne soit pas trop indigeste.