Petite resurrection de ce sujet !voilà, après visionnage intensif de la trilogie en version longue la semaine dernière, je crois avoir enfin compris l'intention de PJ quant au personnage d'Aragorn.S'il est plus enclin au doute que le personnage de Tolkien, s'il n'a pas endossé son destin, s'il a des faiblesses et des emportements dans les deux tours, c'est que tout tourne autour de l'éducation d'un futur roi.Avant la Moria, il est bien : c'est le "rôdeur" du nord, il assiste Gandalf, il n'est pas un leader. Après la Moria, il ne prend la direction du groupe que parce que Boromir n'est pas fiable, mais il est maladroit : Boromir est compatissant et demande du repos pour les hobbits, mais Aragorn
qui ne sait pas diriger un groupe impose brutalement de continuer.Dans la Lorien, son attitude est presque choquante : quand il arrive, il se met à sourire, tout à ses souvenirs d'insouciance - voudrait-il encore échapper à ses responsabilités ? on le dirait.Le long du fleuve, jusqu'à la séparation, il n'est encore chef que par défaut, et c'est pourquoi l'hypothèse de son "soulagement" empreint de culpabilité lorsqu'il laisse partir Frodon n'est pas si idiote : il ne peut pas décider pour les autres.Son statut de chef, il l'apprendra à partir de sa rencontre avec Eomer, puis de son passage au Rohan : le nouveau Gandalf, plus sage, s'efface un peu, et Aragorn se retrouve face à deux personnages :- Eowyn, qui le voit directement comme un grand homme et qui ne cesse de lui dire "les hommes se battent pour vous, ils ont trouvé leur capitaine"...- Théoden, qui le voit un peu comme un rival (et c'est nouveau pour lui) et qui le contredit sans cesse : Aragorn veut aller se battre ? Théoden lui rappelle que son devoir est de protéger son peuple. Au gouffre de Helm, Aragorn s'énerve parce que c'est mal engagé ? Théoden lui rappelle que les hommes ne peuvent tenir que si les rois préservent leur espoir. Et du coup (je crois que c'est dans cet ordre en tout cas), Aragorn qui a bien appris sa leçon transmet à Legolas. Et à la fin du siège, quand c'est Aragorn qui persuade le roi de faire une sortie, la formation est presque achevée : son conseil d'égal à égal est enfin accepté. Cette théorie explique aussi le caractère très Shakespearien du personnage de Théoden : archétype de vieux roi, il enchaîne les monologues tragiques et les postures théâtrales (quand il reçoit Elrond dans le retour du roi, la posture légèrement inclinée à l'ouverture du rideau ... euh, de la tente) ... c'est un modèle du genre. Entre temps, la "chute" d'Aragorn et sa fausse mort apparaissent alors comme symboliques : les circonstances le sépare du groupe auquel il est enchaîné depuis Fondcombe. Il serait indigne d'imaginer qu'il puisse vouloir déserter, mais peut-on envisager un doute, une envie de combattre l'ennemi autrement, ailleurs, de façon plus solitaire ?Impossible, la transformation est déjà amorcée : c'est un meneur d'homme ... et de toutes façons, l'armée en marche qu'il aperçoit ne lui laisse pas le choix.Dernières étapes de sa formation, le départ par le chemin des morts (alors que contrairement au livre, il n'est pas sûr de sa légitimité ni de sa réussite, seul le devoir le pousse), la nécessité de s'imposer aux spectres (ça ne va pas de soi dans le film, et il doit enfin s'auto proclamer héritier d'Isildur !) et, surtout, la libération des parjures après leur bataille. Il y a un temps d'hésitation marqué par les réticences de Gimli, qui matérialise la dernière leçon au futur roi : même si ça lui coûte, il doit tenir parole. Le discours devant les portes du Mordor est le bout du chemin pour lui : peu importe la tournure que prendra la guerre, il est devenu roi.Voilà, si quelqu'un veut démonter complètement ma petite analyse maintenant ...
