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Je ne suis vraiment pas sûr que des mouvements protestants comme les Quakers, les Amish, les Mormons, les Puritains...
Ce sont des chrétiens fondamentalistes pas des protestants. Le protestantisme pour moi ce sont les églises réformées calvinistes et lutheriennes ainsi que les anglicans et les églises schismatiques dérivées. Rappelons que le mot chrétien aux USA sert à désigner surtout les évangélistes qui sont une église chrétienne fondamentaliste. Ils représentaient 3% des américains dans les années 70 et aujourd'hui atteignent 30% environ surtout grâce à l'action des télévangélistes. L'invasion religieuse aux USA est un phénomène récent.Sinon le département où l'on a créé la première bibliothéque départementale de prêt c'est l'Ardèche qui est :- Un département protestant- Un des département français où l'on lit le plus.
mais le catholicisme le fit aussi à sa manière après le Concile de Trente.
Sauf que dans le catholicisme le seul à avoir le droit de lire les textes saints c'est le prêtre dixit Régis Debray. Moins de gens sont capables de lire la bible mieux ça vaut. Donc pour le catholicisme pendant longtemps seul une élite puvait accéder à la lecture. Celle dont on était sûr qu'elle ne contesterait pas le dogme. A coté de ça c'est vrai il y a les efforts des jésuites * pour promouvoir la culture et parfois contre les intérêts même de l'église (reduccion en Amérique latine entre autre). Donc c'est beaucoup moins simple que ce que j'ai présenté mais c'est quand même les grandes lignes.* Et les jésuites dans l'église de France c'est assez négligeable.

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La nuance que tu as apportée dans tes propos est tout à ton honneur !* Toutefois je reste sur ma position concernant la sécularisation des pays protestants.Je ne suis pas sûr qu'on puisse parler de séparation entre religion et société civil aux Etats-Unis."In God We Trust", "Que Dieu Bénisse l'Amérique", les paroles de l'hymne américain... c'est pas récent tout cela !2 exemples assez parlant :- un parent d'élève américain avait demandé à ce qu'on fils soit exempté de la prière obligatoire à l'école car il soutenait que lui et sa famille était athées : refus du chef d'établissementLe père de famille, en bon américain, est allé au tribunal et a obtenu gain de cause : suppression de la prière obligatoire dans ledit établissement.Résultat sa voiture vandalisée et sa maison saccagée... C'est beau la tolérance !- un échange linguistique entre un lycée français et un lycée américainTout se passe bien jusqu'à l'heure du repas à la cantine où les Américains exigent un temps de silence pour pouvoir faire un prière collective.On leur explique que dans l'école de la République française cela n'est pas possible...Au lieu de trouver un arrangement, les Américains sortent faire leurs valises et repartent aussitôt...* 30% de fondamentalistes c'est énorme (et inquiétant) ! :ph34r: Mais je crois pas que l'invasion religieuse soit si récente que cela... Certains épisodes de la série culte Les Envahisseurs en parlaient déjà dans les années 1960 !Sans remonter aux ridicules procès de Salem (dès le XVIIème siècle il y a en France plus de sanctions pour hystérie que de procès pour sorcellerie...), je pense davantage que les mouvements dits "intégristes" sont plus des dérives plus ou moins naturelles des mouvements religieux dits "classiques" que des mouvements de nature fondamentalement différentes.* Dans le catholicisme pré-Vatican II seul les prêtres ont le droit de lire la Bible, mais rien n'interdit aux fidèles de lire des des vies de saints, des recueils de prières, des livres de catéchisme... sans parler des romans de chevalerie qui connaissent un grand succès jusqu'à la Révolution Française.Les Jésuites et leur souci de l'éducation ont beaucoup œuvré à la diffusion de l'alphabétisation et d'une certaine culture y compris humaniste : ils ont bien mal été récompensés par les philosophes des Lumières dont ils ont été les têtes de turcs.Mais on ne peut pas dire que la lecture était réservée à une élite dans un pays catholique comme la France qui comptait presque 60% d'alphabétisés (pas bien doués certes, mais quand même) en 1800 !* Toutes les remarques concernant la pratique de lecture dans les milieux protestants sont plutôt vraies.Je suis assez d'accord sur ce point avec toi, mais je pense que les bons résultats des populations protestantes françaises s'expliquent par le fait que les impératifs de lecture personnelle propres au protestantisme s'étaient rajoutées à un niveau culturel déjà assez bon pour l'époque (sans parler du fait que les convertis français étaient peut-être déjà cultivés car appartenant à un milieu socio-culturel en moyenne assez élevés pour l'époque sauf dans les Cévennes)

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Je viens de comprendre ma gêne (aparté pour moi même) : le mot alphabétisation ayant été prononcé tout me revient. La France a longtemps été l'un des pays les plus alphabétisés d'Europe comme l'a très justement dit Albéric, puis on a perdu notre avance (idem pour le réseau ferré français qui était le plus avancé d'Europe avant la révolution industrielle où les anglais et l'équivalent des allemands nous ont rattrapé puis dépassé ensuite). Le catholicisme n'était donc pas un désavantage par rapport au protestantisme en matière d'alphabétisation et donc d'accès aux livres. Peut être qu'à la différence d'autres pays, en France, l'offre et l'accès à des livres non lithurgiques étaient ils plus restreints ! On ne peut pas en conclure qu'on lisait moins mais qu'on lisait différemment.
Albéric a écrit :Comparer le nombre de livres vendus par habitants est-il l'indicateur le plus pertinent ?Dans le cinéma le box office américain compte l'argent gagné, le box office français compte le nombre de spectateurs...
Autant un livre peut être acheté et ne pas être lu, autant un film dont on paie la place, sera (très généralement) vu.Les chiffres de vente d'un livre sont donc difficilement interprétables seuls, ce qui compte, c'est le bouche à oreille : plus le livre est méconnu initialement, plus ses ventes seront révélatrices d'un éventuel succès, alors qu'un auteur connu vendra peut être beaucoup mais nombre de ses livres finiront en vente sur Amazon ou dans un tiroir car offert comme valeur sûre par l'acheteur à des personnes qui ne lisent pas. Je crois davantage aux révélations qu'aux valeurs sûres. Quand je parle de révélations, je parle de celles amenées par le lecteur, c'est à dire quand les critiques se réveillent un beau jour en se disant : "je ne l'avais pas vu venir celui là" et pas les pseudo révélations fabriquées par des éditeurs au coeur de l'été ou à la rentrée littéraire.

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Je vais schématiser :en partant d'un niveau d'alphabétisation très correct, la démocratisation de la lecture en France s'est faite en 3 temps- la mise en place de l'instruction obligatoire : il faut bien apprendre à lire avant de lire- le développement de la presse bon marché : le média le plus immédiatement accessible pour des populations qui n'avait pas beaucoup de temps et d'argent (comment lire un gros roman après une journée de 12h à l'usine ?)- l'essor des romans-feuilletons avec Balzac, Victor Hugo, Eugène Sue, Alexandre Dumas, Jules Verne, Émile Zola... (équivalents des séries "à suivre" du genre Alias, Lost, Prison Break & Cie) qui ont fidélisé un public lecteurEx: Le Nautilus est pris dans les tentacules d'un calmar géant... Vont-ils s'en sortir ? Vous le saurez en nous lisant demain !Il serait intéressant si savoir si on retrouve ces 3 temps dans les autres pays, et si oui avec quels auteurs quels œuvres ?Rq: Verne et Dumas sont les 2 auteurs français les plus lus dans le monde, bizarrement se sont 2 auteurs complètement délaissés dans les études des auteurs français à l'école, allez savoir pourquoi ?

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En Angleterre :- Développement de l'alphabétisation de masse fin 17éme (deux siècles avant Jules Ferry)- Développement des cabinets de lecture (ancêtre des bibliothèques publiques) - 18 éme- Presse bon marché fin 18 éme- Association d'éducation populaire 19 émeJ'ai eu des cours d'histoire de la lecture lors de divers formations donc je connais bien le sujet.
Les Jésuites et leur souci de l'éducation ont beaucoup œuvré à la diffusion de l'alphabétisation et d'une certaine culture y compris humaniste : ils ont bien mal été récompensés par les philosophes des Lumières dont ils ont été les têtes de turcs.
Curieusement, même si sous Louis XIV ils ont réussi à s'imposer face aux Jansenistes, le roman fondateurs du roman français moderne - la princesse de Clèves - est une oeuvre janseniste presque intégriste. Et d'ailleurs les Jésuites ont été les têtes de turc de l'église également. Mais bon ils sont aussi à l'origine des prêtres ouvriers et ont pas mal influencé Vatican 2.Sinon il y a eu de la fantasy ou peu s'en faut au début du 17 éme ( Gombertville , la Calprenède). Il est bien dommage que leurs oeuvres n'aient pas d'éditions modernes parce que je serais curieux de la chose.

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Pour en revenir à la différence de prix, je ne peux qu'être d'accord avec les remarques de Beorn en page 1. Rien que l'achat des droits et la traduction (et pourtant, les traducteurs sont loin d'avoir des salaires de fous, je vous "rassure")...Par contre, je crois que c'est Dark Schneider qui disait que les romans français n'étaient pas moins chers pour autant, mais je ne crois pas : il me semble par exemple que chez Brage les Pevel ou les Ange sont à 18 contre 22 en moyenne pour une trad. Non ?

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Concernant les X tomes du Trône de Fer adapté en X fois 2,3 ou 4 tomes par Pygmalion, Altaïr a écrit :
Jonathan Strange & Mr Norrel est vendu en broché 23 euros, pour 864 pages (1024 pages en version poche), de la fantasy traduite de l'anglais, sous la forme d'un très beau livre, du beau papier, et même le choix entre 2 couvertures (une blanche ou une noire), en prime !... mais c'est chez robert Laffont
Je plussoie d'autant que je trouve que la comparaison fait très mal !

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Et je confesse avoir acheté ce livre en grande partie parce que je trouvais les bouquins tout simplement beaux. C'est rarissime que j'achète des versions brochées, généralement j'attends la sortie en poche... (d'ailleurs je ne l'ai toujours pas lu *a honte* )Pour moi la lecture d'un bouquin, c'est certes le texte, mais je suis également très sensible à la qualité physique d'un ouvrage, au choix du papier, du lettrage, de la couverture... tiens d'ailleurs je n'ai racheté (et du coup relu avec délectation) le trône de fer en VF que parce que les intégrales j'ai lu me plaisaient... je ne serais jamais passée à l'acte sans cela.Les livres en VO sont moches, mais au moins ils ne sont pas chers.Très intéressant sinon le débat sur les différences culturelles sur le rapport aux livres.

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Attention à ne pas tout mélanger. Robert Laffont a publié Jonathan Strange & Mr Norrell totalement en dehors du microcosme de l'édition fantasy parce que le livre de Susanna Clarke s'y prêtait très bien : ton, époque, magie assez effacée ou tout du moins pas trop "bizarre" pour le grand public, prix du roman de l'année 2005 par Time Magazine, des ventes énormes à l'étranger... En choisissant l'optique de le publier comme de la littérature blanche, Laffont peut toucher un public beaucoup plus important et s'appuyer sur un buzz déjà conséquent, basé sur le même principe qu'un Harry Potter ("un Harry Potter pour adultes"). C'est sûr qu'avec des publications comme ça tu prends beaucoup plus de risques : un budget pour la communication (je crois me souvenir de pubs radio), un grand pavé, une édition noire/blanche,...A côté de ça, le Trône de Fer est quand même clairement orienté pour un public déjà acquis à la cause de la fantasy. Sans compter que la notoriété du cycle a été très progressive ; la parution du premier tome en VO n'a pas fait le même battage médiatique que Jonathan Strange & Mr Norrell. On ne peut pas dire que Pygmalion avait la même marge de manœuvre pour publier le Trône de Fer que Laffont avec le bouquin de Clarke.Ceci dit, je suis vraiment allergique aux découpages aussi et le succès de Goodkind en France montre qu'on peut aussi publier de grosse saga avec quelques gros tomes (La Pierre des Larmes est un beau pavé) sans écrouler son budget. Bon, le gros succès dû au bouche à oreille de La Première Leçon du Sorcier, déjà plus petit, a sûrement aidé à ne pas découper le second tome et à faire une belle édition.

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Est-ce que la fantasy est considérée comme une littérature de genre pour public de niche à cause de ses éditions bâclées, ou bien sont-ce au contraire les éditions bâclées qui font perdurer cette image de sous-littérature de genre, là est la question :)