Il était une fois un temps où la Fantasy ne se résumait pas à des héros adolescents qui sauvent le monde guidés par une prophétie, ou à des héroïnes sexy qui fricotent avec des vampires et des loups-garous. Dilvish le Damné appartient à cette autre époque : dieux oubliés, maîtres sortilèges du temps passé, magiciens surpuissants, démons récalcitrants, héros déchus qui ne peuvent pas s’empêcher de continuer à sauver la veuve et l’orphelin… bienvenu dans le monde de Roger Zelazny, l’un des rares auteurs à avoir été aussi à l’aise en Science-Fiction qu’en Fantasy.C’est bien évidemment de la Fantasy « Old School », mais on retrouve avec plaisir la plume et l’univers de Roger Zelazny.Et malgré les 20 années qui séparent les différentes nouvelles, les histoires s’enchaînent très bien en dépit de quelques hiatus
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(le duel avec Lance à l’armure indestructible, le réveil des légions maudites de Shoredon et la libération de Portaroy, l’épée de Sélar, le sort de Rhina…)
Les 1ères nouvelles m’ont semblé du même tonneau que celles du
Dit de la Terre Plate : narration détachée, ambiance éthérée, univers de conte de fées. Après on revient à de la sword & sorcery plus classique avec notre Colonel de l’Est, le Libérateur de Portaroy, bon épéiste et maître en sorcellerie, même si sa mystérieuse monture Ténèbres, espèce de Jolly Jumper démoniaque, en sait bien plus que lui sur les arts magiques.J’ai bien aimé
la Tour de Glace (et son final pas piqué des hannetons), et
la Danseuse et le Démon (et son final doux-amer).Le roman en lui-même est pas mal du tout avec son Château-Hors-du-Temps situé au cœur des indescriptibles
Terres Changeantes éponymes qui nous rappelle au bon souvenir des Cours du Chaos des
Princes d’Ambre du même auteur. Entre les mages noirs, blancs et gris qui font cause commune pour se la jouer
Grande Évasion, une double histoire d’amour toute empreinte de nostalgie et un Jélérak plus fourbe que jamais, les pages défilent très vite.Au fil des pages justement on s’attache de plus en plus à ce Dilvish conçu dans le même moule du désabusement et de la quête de revanche que Corwin (les
Princes d’Ambre encore), et à son fidèle compagnon cynique et moqueur.
En bref :Si dans le passé vous avez aimé Roger Zelazny, Fritz Leiber, Michael Moorcock, vous passerez un bon moment.
Si dans le passé vous n’avez pas aimé Roger Zelazny, Fritz Leiber, Michael Moorcock, passez votre chemin.Si vous voulez découvrir ces auteurs, mieux vaudrait commencer par quelque chose de plus consistant de la part de ces auteurs.
Un bon 7,5/10 de nostalgie !En passant excellente critique de
Gillossen Publivore, qui a vraiment tout résumé, qui a vraiment bien cerné le livre, ses thématiques et ses personnages de manière aussi concise qu’efficace ! Du grand art !Attention toutefois à la remarque sur
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« une conclusion assez surprenante, voire frustrante pour l’amateur de fantasy épique »
Les ayatollahs des spoilers ont lancé des fatwas pour moins que cela !Pourtant effectivement, avec du recul cette mise en garde n'est pas du luxe.Sinon cet échange m’a laissé perplexe entre Dilvish et Ténèbres :
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Dilvish : Il m’arrive de me demander si tu es réellement un démon.Ténèbres : Je n’ai jamais prétendu en être unDilvish : Mais… qu’est-ce que tu es alors ?Ténèbres : Tu ne sauras jamais à quel point tu as été proche de la vérité (dit-il en éclatant d’un rire à la JR Ewing, du moins je me l’imagine)
Et bonne chance pour prononcer le nom du démon
Melbriniononsadsazzersteldregandishfeltselior !
PS :Selar, paladin elfe plaçant le devoir (en l’occurrence son affrontement au sommet avec une divinité maléfique) au-dessus de sa propre vie, il a une bonne tête de Fingolfin ! Pourtant on ne sens à aucun moment avoir à faire à un décalque de J.R.R. Tolkien.