Pour répondre à la question de Lord of Crows : pour ma part, ce sont Samwell Tarly, Brienne de Torth et le Limier, trois personnages qui cachent une grande richesse et beaucoup de blessures sous une apparence peu taillée pour la gloire au premier abord. Chez les Stark, j'aime bien Bran pour le côté mystique qu'il apporte, et la porte qu'il ouvre au lecteur pour connaître le mystérieux passé du monde.Sinon, je mets ici ma critique de ce que j'ai lu du trône de fer, à savoir jusqu'au tome 4 de l'intégrale j'ai lu semi-poche (ce n'est pas parce que tout le monde connaît qu'on ne peut pas faire la critique...

).En ce qui me concerne, le trône de fer n'est clairement pas mon cycle préféré, même s'il n'est pas dénué de qualités pour autant. Je trouve également intéressant de se pencher dessus en allant un peu au-delà de l'oeuvre elle-même, pour interroger le cycle en tant que réel courant littéraire, et son impact sur les autres oeuvres de fantasy actuelle.Passons directement à ce que je n'aime pas, afin d'évacuer en un coup la partie la plus douloureuse de ma critique. Comme je le disais, ce cycle n'est pas mon préféré, et ce pour plusieurs raisons. En premier lieu je trouve le
style parfois relativement lourd, et ce de façon un peu inutile (je me souviens avoir eu du mal à rentrer dedans à cause de cette caractéristique au début). Ensuite, je suis plutôt un amateur de la fantasy "lumineuse" et "initiatique", qui apporte une certaine dose d'enchantement par rapport à une réalité quotidienne pas forcément joyeuse. Avec son
côté dur et relativement amoral jusqu'ici, le trône de fer me laisse un sentiment mitigé, même si j'apprécie son originalité de traitement.Dans la droite ligne de la consideration précédente, j'aime beaucoup les histoires qui voient les héros se lancer à l'aventure pour découvrir les sombres vérités sur le passé oublié du monde, lequel génère une nouvelle menace qui n'est en réalité que le retour d'un mal ancien. Le trône de fer traite clairement cette thématique, mais en en faisant un élément laissé trop lontemps laissé en arrière-plan à mon goût. Dit autrement :
ce qui m'intéresse, c'est la menace des marcheurs blancs (et celle de R'lor), l'ancienne foi, le mur... et ce sont précisément ces parties qui n'avancent pas. A nouveau, on sent que c'est volontaire et que cela fait partie de l'originalité du récit, mais ce n'est tout simplement pas ce que je cherche.Enfin, un dernier point très important qui me permettra de faire la liaison avec la (piste de) réflexion plus large que je me propose de faire ensuite : la
multiplication des points de vue qui va de pair avec l'élargissement de l'univers. Si le procédé est novateur et plutôt bien vu (surtout à cette échelle), il me semble particulièrement casse-gueule. Parce qu'à force de multiplier les points de vue, on s'enlise, avant de se perdre, et de perdre la maîtrise de sa creation ensuite. D'après mon ressenti, Martin est en plein dedans, et c'est pour ça que cet auteur et le genre littéraire qu'il incarne ont encore tout à prouver à mes yeux. Ils doivent encore prouver que cette pelote de laine pleine de noeuds est capable de se transformer en une tapisserie finie, complète et cohérente du début à la fin. Ce dont je doute pour le moment, tout en attendant de voir venir.Là où cela fait le lien avec ma réflexion plus globale, c'est que j'ai le sentiment que ce cycle, et plus précisément cette particularité de multiplication des points de vue, ont créé un courant littéraire qui influence d'autres oeuvres. Or, comme ce style a démontré qu'il était très difficile et qu'il n'est pas forcément viable, j'ai un peu la crainte que les cycles qui suivent ce chemin ne courent vers une série de gros échecs décevants. Je pense au cycle du trône de fer bien sûr, mais aussi à des cycles comme l'épée des ombres de J.V.Jones ou des series télévisuelles comme Vikings.De mon point de vue, le seul cycle de ma connaissance qui ait réussi ce tour de force, c'est "un monde sans dieux" de Brian Ruckley. Et, toujours selon moi, la réussite de ce tour de force vient de la discipline de fer de l'auteur, dont on sent qu'il a suivi un plan solidement établi à l'avance sans jamais s'en écarter malgré les nombreuses tentations qu'il aurait pu avoir à le faire. Exercice dans lequel Martin me semble d'ores et déjà avoir échoué, ce qui le condamne à trouver une nouvelle méthode/voie... que j'espère qu'il trouvera, aussi bien pour le trône de fer en lui-même que pour toutes les productions qu'il influence, qui possèderont alors au moins une recette exploitable pour se sortir de la panade lorsqu'elles y sont.Enfin, si je devais mettre une note au trône de fer, je mettrais probablement un 7/10 d'encouragement, même si mon ressenti le situe plutôt au niveau du 6.
