Un vent violent poussait une masse de nuages grise vers des horizons lointains qu’elle semblait pressée de rejoindre. Sous cette nuée vaporeuse, sur un lit d’herbes folles, elle reposait. Toute vie paraissait l’avoir quittée et les perles de sang qui parsemaient son corps étaient autant de témoignages d’une mort possible. Pourtant, un observateur attentif aurait pu voir sa poitrine se gonfler régulièrement, se chargeant de l’air lourd et humide environnant. A quelques pas de la jeune femme, un saäbel ensanglantait attesté que l’endroit avait été témoin d’un violent combat.Fleurène ouvrit un oeil sur le ciel hostile. Immédiatement, elle prit conscience de mille douleurs qui traversaient sa chair, lui arrachant un cri plaintif. Elle trouva la force de se redresser pour chercher du regard son ennemi mais la clairière n’offrait à sa vue que des vagues d’herbes mouvantes chahutées par le vent. Son ketzal lui-même n’était plus visible, elle devinait cependant sa présence derrière les premières frondaisons de la forêt. C’est vers l’endroit où elle rencontrait ce contact qu’elle lança son appel silencieux. L’instant d’après, Elléa, animal à la tête d’aigle au corps de cheval et aux pattes de félins s’approchait de Fleurène et venait fourrager de son long bec crochu dans sa longue chevelure brune.- Arrête ! Ne vois-tu pas que je souffre ? Lui dit-elle avant de lui intimer mentalement l’ordre de la protéger du vent glacial piquant de ses aiguilles ses multiples blessures.Sans demander son reste l’animal se coucha près de Fleurène de manière à former un écran contre le vent. Elle le remercia mentalement et se dressa à nouveau pour attirer à elle un sac fixait sur le pommeau de sa selle. Du sac, elle sortit un flacon qu’elle vida d’un trait avant de s’enfoncer, à nouveau évanouie, sur son matelas d’herbe. Lorsqu’elle sortit de son demi coma quelques heures plus tard, Fleurène sut que ses plaies ne seraient bientôt qu’un mauvais souvenir, et elle parvint, sans trop se ressentir de ses douleurs, à se mettre debout. Une rapide inspection de son corps musclé et élancé la satisfit quand elle constata que celui-ci répondait à ses sollicitations. Sans qu’Elléa se soit relevé, Fleurène monta en selle. Le contact soyeux et duveteux de l’animal la fit frissonner de contentement et la jeune femme trouva au fond d’elle-même une nouvelle vigueur qui acheva de la replonger dans la réalité.Qui étaient ces hommes qui avaient tenté de l’assassiner ? Par qui étaient-ils envoyés, et dans quel but ? Autant de questions qui pour l’heure ne laissaient deviner aucunes réponses, mais qu’elle, Fleurène, était bien décidée à résoudre. Elle porta la main à sa ceinture pour sentir le contact rassurant de son saäbel et s’aperçut qu’il n’était plus dans son fourreau. Ses yeux, d’un vert printemps intense, scrutèrent alentour à la recherche de la précieuse arme qu’elle découvrit quelque mètres devant elle. D’un bond elle se retrouva au pied de son ketzal, puis d’un autre, elle se trouva suffisament proche pour empoigner l’arme qui n’avait pas faillit dans ses mains en début de journée. Alors, toute sa vigueur revenue, elle leva son bras armé vers le ciel et poussa un terrible cri de délivrance.